La recherche a pour objet l'étude des transformations architecturales de la place Navone, de la construction du stade de Domitien à nos jours. La place Navone est aujourd'hui à la fois l'un des principaux pôles touristiques de la capitale italienne et, selon une enquête récente, le lieu que les romains considèrent comme étant le plus représentatif de leur ville (Centro Studi Investimenti Sociali, 2005). Or, la notoriété de ses fontaines et de ses façades baroques contraste avec le relatif petit nombre des travaux qui lui ont été consacrés au cours des dernières décennies par les archéologues, les historiens, les architectes ou les sociologues. Le moment semble venu de se pencher de nouveau sur la destinée singulière d'un édifice de spectacle construit au premier siècle de notre ère dont l'empreinte s'est conservée jusqu'à nos jours dans le tissu urbain au coeur du centre historique de Rome et dont l'orientation a déterminé, outre la distribution des quartiers environnants, le déploiement des palais de la Renaissance, les perspectives de Rainaldi ou Borromini, les solutions décoratives du Bernin. Sur le plan bibliographique, quatre indices témoignent de cette carence de la recherche : l'ouvrage de A. M. Colini, Stadium Domiziani, publié en 1943, n'a pas été à proprement parler « renouvelé », en dépit d'une réédition récente (Rome, Quasar, 1998) qui expose sur une dizaine de pages les résultats des fouilles de l'immédiat après-guerre ; la principale monographie sur l'histoire de la place (Piazza Navona. Isola dei Pamphilj, Rome, Franco Spinosi, 1970) a trente-six ans, soit un an de moins que le volume de la série Guide rionali di Roma couvrant cette zone urbaine (Rione VI-Parione dir. C. Pericoli Ridolfini, Roma, 1969). Le catalogue de l'exposition de 1973 (Piazza Navona centro di Roma, dir. A. Ravaglioli) constitue la synthèse la plus récente. Au-delà d'un aggiornamento devenu indispensable, le projet innove, tant du point de vue des techniques adoptées (modélisation 3D ; relevés pour l'établissement d'un SIG), que de la démarche envisagée : celle-ci vise à rassembler le plus grand nombre de données susceptibles de préciser vingt siècles d'évolution d'un quartier de Rome, en ouvrant le plus largement l'éventail des sciences humaines et sociales et en permettant aux chercheurs venus d'horizons divers, non seulement d'échanger leurs données ou les résultats de leurs investigations, mais aussi, à chaque étape d'avancée de l'enquête, de confronter leurs méthodes d'analyse. La problématique et l'identité de la recherche La place Navone se caractérise par la conservation d'un tracé, mais également par celle d'une grande qualité architecturale : la plus remarquable place de la Rome moderne remplace ainsi l'un des plus admirables monuments de la capitale impériale. Ces continuités ne sont pas le fruit du hasard mais celui d'un processus complexe, que seule une étude pluridisciplinaire et diachronique peut nous permettre de mieux comprendre. L'originalité de ce projet est, en premier lieu, de recréer un lien entre deux champs distincts de la recherche (architecture antique et urbanisme moderne), mais qui, à l'épreuve de la recherche sur le terrain, révèlent l'importance déterminante de la continuité et la nécessité d'une approche globale. Sur le site de la place Navone, l'Antiquité, le Moyen Age, la Renaissance ou l'époque baroque sont physiquement reliés, superposés, juxtaposés, et les interventions réalisées au cours des siècles furent en permanence déterminées par la présence du monument de spectacle dont les volumes, les matériaux, les murs et le tracé demeurent présents, de manière plus ou moins nette, tout au long de l'histoire de la place. L'entreprise a été amorcée en raison des travaux de rénovation et de restauration engagés dans l'immeuble situé au 62 place Navone et occupé par l'Ecole française de Rome. Sur l'emplacement de la casa Razzanti de l'époque de Grégoire XIII (1572-1585), l'édifice actuel a été construit